Histoire de l'Akita Inu - Partie 1 - Époque préhistorique et antique (-8000 à 1185)

On suppose que le chien est arrivé sur l'archipel japonais au cours de migrations humaines survenues il y a plus de 10 000 ans avant que l'actuelle Mer du Japon (Nihonkai - 日本海) ne sépare définitivement le Japon du reste du continent asiatique.

Au cours de l'ère Jōmon (縄文 - 8 000 à 300 av. J.-C.), les autochtones vivaient dans des habitations appelées tatehana (竪穴), des sortes de huttes sur terre battue et semi-enterrées sur 10 cm à 1 mètre de profondeur. Les traces de pattes retrouvées à l'intérieur de ces habitations laissent à penser que les chiens étaient déjà élevés par l'Homme, il y a de ça environ 3 000 ans. Ces traces mesurant entre 4,3 et 5,7 cm de long indiquent que les chiens étaient de taille moyenne. À cela s'ajoutent des ossements de chiens, très souvent retrouvés parmi les sépultures de l'époque.

Impossible de parler de l'Akita Inu sans faire un peu de géographie, car mine de rien elle influencera l'évolution de la race de bien des façons que ce soit physique ou génétique. Encore aujourd'hui, les lignées sont empreintes de cette notion et les mentalités d'élevage des régions du nord restent encore bien différentes des méthodes du centre ou du sud, par exemple.

Le Tōhoku (東北) signifie littéralement "nord-est" et couvre  tout le nord de l'île centrale de Honshū (本州) comme on peut  le voir en vert sur la carte ci-après.
Il est bordé par les régions du Chūbu (中部 - en orange)  et du Kantō (関東 - en bleu) au sud, et par l'île d'Hokkaidō (北海道 - en rouge) au nord.

Le Tōhoku se divise en six départements, ou préfectures, qui sont :
- Aomori, 
- Iwate
- Miyagi
- Fukushima
- Yamagata 
- Akita (point rouge sur la carte)

 

Le nom même d'Akita Inu (秋田犬) signifie "chien d'Akita". 

 

Remarque : "Akita Inu" est la seule lecture officielle, ainsi "Akita Ken" est incorrect au sens propre et provient soit d'une confusion avec Akita Ken (秋田県 = préfecture d'Akita), soit d'une mauvaise lecture du kanji "chien" (犬) comme dans Nihon Ken (日本犬 = chiens japonais). De même qu'Akita est invariable puisqu'il provient d'un nom propre.

L'Akita Inu puise ses racines dans la ville d'Ōdate (大館), mais également dans la campagne environnante de la préfecture d'Akita comme en témoignent de nombreuses traces historiques. Depuis longtemps, le nom même d'Ōdate est associé au chien dans toute la région du Tōhoku. Au XIXe siècle (fin de l'ère Tokugawa), les chiens domestiques, dont le nombre avait considérablement augmenté grâce à une situation socio-économique favorable, ont été petit à petit utilisés à des fins de combat. Après la restauration Meiji en 1868, les combats de chiens étaient devenus de véritables évènements publiques et un grand nombre de chiens furent découverts à Ōdate, appelée pour lors la "ville des chiens".

Plusieurs noms furent attribués à la race au fil du temps. Ainsi, elle fut connue sous le nom de "Ōdate Inu" (大館犬) et de "Kazuno Inu" (鹿角犬) dans ces zones respectives, au nord de la province d'Akita. Mais elle fut également appelée "Nambu Inu"(南部犬) en référence à un district du nord ayant existé au début de notre ère (période Han en Chine). Pour l'anecdote, le dialecte Nambu-ben (南部弁) existe toujours aujourd'hui dans la région d'Aomori (青森) à l'extrême-nord du Japon. Quoi qu'il en soit, tout le monde s'accorde à dire qu'il s'agissait de "chiens régionaux". Parmi eux, il était possible de faire la distinction entre deux sortes de chiens en fonction leur "utilité". 

Les chiens qui vivaient en ville étaient bien souvent utilisés pour le combat et portaient alors le nom de "Kuwae Inu" ou de "Kuriya Inu" selon le dialecte local.
Ceux qui vivaient dans les compagnes et les montagnes servaient plutôt à la chasse et étaient appelés "Matagi Inu". Dans les deux cas, ces chiens étaient plus ou moins les mêmes. Il s'agissait tous de chiens japonais, élevés dans ces régions très localisées depuis des siècles. Ces chiens sont tous les ancêtres de l'Akita Inu actuel.

 

De nombreux rapports d'études et de recherche furent publiés au sujet des origines et de l'histoire de l'Akita par d'anciens auteurs et chercheurs.

Le Dr. Toru Uchida conclut dans son ouvrage, "Le Livre des Chiens" que "le chien d'Akita se différencie morphologiquement des autres, y compris des chiens de Sakhaline (樺太 - Karafuto), des Laika, des Samoyèdes et même des autres races japonaises. Il ne serait pas incorrect de penser que ce chien ait suivi sa propre évolution plutôt que d'être le pur fruit d'une amélioration humaine."

 

Le Dr. Shozaburo Watase explique dans le volume 22 de la "Société Scientifique" que : "les chiens japonais se divisent en trois souches géographiques : l'extrême-nord, le centre-nord et le sud. Les races de la souche d'extrême-nord sont arrivées avec les humains et possèdent un poil épais, une force de caractère et une queue recourbée sur le dos. La plus représentative est l'Akita."

M. Hirokichi Saito, l'un des fondateurs du NIPPO et éminent chercheur sur les races japonaises, écrit dans son livre "Chiens Japonais et Loups" que : "L'Akita Inu descend d'une race japonaise de taille moyenne croisée avec un chien des souches du nord et un grand chien de Chine. Cette dite-souche comprendrait : les races éteintes du Nambu Inu de Rikuchu (actuelle préfecture d'Iwate (岩手県)), du Kōyasu Inu d'Uzen (actuelle préfecture de Yamagata (山形県)), du Iiyama Inu de Shinshu (actuelle préfecture de Nagano (長野県)) et le Gō de Chine qui était présent dans la zone du Dazaifu à Kyūshū (九州)." 

M. Taiji Kitamura, un célèbre habitant d'Ōdate, exprime une opinion similaire. Dans sa publication pour la lettre d'information AKIHO, il dit : "le Gō ont été apportés du Bokkai (un pays qui s'étendait autrefois de la Corée du Nord jusqu'à la frontière est de la Chine) et croisés avec des races japonaises produisant ainsi les ancêtres de l'Akita Inu."

Les livres seuls ne sauraient décrire en totalité l'histoire de l'Akita. Par ailleurs, aucune trace écrite et rien dans la tradition orale parlant de cette race de chien n'ont été trouvés avant l'ère Tokugawa, contrairement à d'autres races japonaises dont les descriptions remontent jusqu'à l'époque de Nara (aux alentours de l'an 710). La première référence apparaît dans le "Keikō Tennō-ki (le 12e Thrône Impérial), suivi du "Kojiki" (古事記 - 712), du "Sushun Tennō-ki" et d'autres manuscrits contenant des articles sur les chiens. Certaines archives parlent de chiens qui auraient été apportés au Japon comme cadeau avec d'autres animaux et des produits venus de Kudara (un pays situé dans l'actuel Corée du Sud), du Bokkai et d'autres pays. Parmi les sources, nous pouvons citer le "Yōōki", le "Nihonshoki", le "Shokunihongi", le "Ruijῡkokushi", etc. Lors des ères Heian et Kamakura, des chiens sont dépeints dans le "Makuranosoushi", "Genji Monogatari", "Uji Shῡi Monogatari", "Konjaku Monogatari", "Tsurezuregusa", "Taiheiki", etc.

Les premières illustrations de chiens ont été retrouvés, datant du début de l'ère Kamakura (après 1192). De nombreuses images subsistent aujourd'hui, telles que le"Ōjō Yōshῡ E" et le "Gaki Sōshi", illustrant des doctrines bouddhistes appelées "Rokudō E" (image des 6 chemins) ou "Jikkai Zu" (représentation des 10 mondes). Dans la plupart des cas, la présence des chiens n'est que purement fortuite et secondaire au thème illustré.

Les chiens représentés sont souvent de couleur pinto. Deux rouleaux, "Kōbōdaishi Gyōjō Emaki" et "Yadajizō Engi Emaki", sont différents des autres dans le sens où les chiens sont le thème principal, sur fond de montagnes et de champs. Ce sont des chiens de chasse hauts en couleur, conduisant des chasseurs et des samouraïs équipés d'arcs et de flèches.

 

D'autres peintures de chiens apparaissent plus tard dans la littérature médiévale. "Sagami Nyῡdō Dengaku Narabini Touken wo Moteasobukoto" (Jeux avec un chien de combat) écrit par Takatoki Hōjō (北条 高時), dernier tokusō et shikken du shogunat de Kamakura, est un exemple caractéristique. Ce passage se trouve dans le volume 5 du "Taiheiki".

 

Le passage "Hata Rokurōzaemon ga Koto" du volume 22 du "Taiheiki" raconte comment Rokurōzaemon, son chien favori, un "Inu-Jishi" (ou chien-lion), et ses soldats ont attaqué et protégé le château de Takanosu à Kōzuke (actuelle préfecture de Gunma). Au cours de l'ère Nanbokuchō (南北朝), les chiens étaient surtout utilisés à des fins militaires.

Voilà qui résume la présence de chiens japonais dans la littérature ancestrale et médiévale.

 

On dit que le chien est le premier animal à avoir été domestiqué. Jadis, à une époque où la chasse faisait partie intégrante de la vie de tous les jours, les chiens étaient à la fois des partenaires de travail et des compagnons qui suivaient le déplacement des peuplades encore nomades. Les vestiges et les artefacts découverts à Akita indiquent que la chasse et la cueillette étaient un style de vie encore dominant pendant les périodes Jōmon et Yayoi (弥生 - 300 av. J.-C. à 400 ap. J.-C.).

Les premières cultures de riz remontent au IIIe siècle, mais les techniques agricoles modestes et l'environnement peu accueillant ne permettaient pas une productivité suffisante pour nourrir la population. Cette situation força donc les Hommes à rester dépendants de la chasse et de la pêche pour survivre. Et même si par la suite l'agriculture prit une part de plus en plus importante dans la vie de tous les jours autour d'Ōdate, la chasse resta ancrée dans les mœurs jusqu'à l'ère moderne Meiji (明治 - 1868 à 1912).

Certains individus vivant encore de la chasse créèrent des villages de chasseurs appelés villages de Matagi (マタギ). Ces villages répartis dans les préfectures d'Akita, d'Iwate et de Yamagata étaient pourtant réputés pour posséder les mêmes méthodes de chasses et les mêmes us et coutumes. Les Matagi Inu (chiens de chasse japonais) étaient élevés dans ces villages depuis le début de leur existence et jusqu'à récemment.

 

Comme l'Ōdate Inu, le Nambu Inu ou d'autres races locales, il n'existe aucune trace écrite ou orale à leur sujet. Nous ne pouvons qu'imaginer les conditions environnementales et sociales autour d'Ōdate à cette époque.

D'après les fudoki (風土記 - des rapports décrivant les coutumes, l'histoire et les notes géographiques des divers régions du Japon) et d'autres sources, la région du Tōhoku était séparée en deux sur 500 km par les montagnes d'Ōu ( 奥羽山脈 - Ōu-sanmyaku) ; la partie bordant la Mer du Japon et celle bordant le Pacifique. La zone d'Ōdate était donc séparée du reste de la région par les montagnes à l'est et par le climat au sud. L'accès par le sud aux moments les plus rudes de l'hiver était impossible ni par la mer ni par la terre, limitant ainsi le développement de cette zone. Ceci pourrait d'ailleurs expliquer partiellement les différences physiques et les types de l'Akita Inu actuel.

Les conditions sociales dans la région du Tōhoku à cette époque sont également intéressantes. Des clans très puissants émergèrent et s'affrontèrent perpétuellement. Aux alentours de l'an 500, la Cour Impériale de Yamamoto fut établie et devint un état souverain au VIIe siècle avant d'entreprendre son expansion vers le Tōhoku où elle tenta à plusieurs reprises d'assouvir les Emishi, des habitants des régions du nord qui refusaient de se plier aux lois de la cour impériale. Immédiatement après la Réforme de la période Teika en 645, la province de Mutsu fut établie au Tōhoku. Jusqu'à cette époque, c'était une zone qui n'était pas considérée comme étant sous l'influence de la Cour Impériale de Yamamoto. Un demi-siècle plus tard, la province de Dewa est créée. Cette province s'étendait à l'endroit où se trouvent les préfectures actuelles d'Akita et de Yamagata. Peu de temps après sa création, le large flux d'immigrants venus du Kantō et du Chūbu permit le développement de la région. Cette immigration et ce développement furent la source de conflits avec les patriarches et les clans puissants de la région, ainsi que d'une angoisse croissante. Cependant, étant donné leur esprit négatif et leur antagonisme envers le développement de la région, ils se révoltèrent à tel point que les efforts de développement furent grandement ralentis. De féroces batailles s'enchaînèrent entre la cour impériale et les propriétaires terriens locaux. On ne sait rien du développement et du type de chiens élevés dans cette région à cette époque. On devine toutefois que la fixation d'un certain type a pris part à ce moment. Dans son livre, M. Hirokichi Saito écrit : "les ossements de plus de 300 chiens déterrés à divers endroits du Japon nous indiquent qu'ils mesuraient entre 37 et 50 cm au garrot, contre 57 cm pour ceux trouvés à deux endroits du Tōhoku."

Au cours de l'époque Azuchi Momoyama (安土桃山 - 1573-1602), les marins et marchands portugais et espagnols visitèrent le Japon en apportant des chiens avec eux. Certains sont illustrés sur les estampes que l'on peut voir dans les musées entre autres.

Histoire de l'Akita Inu - Partie 2 - Époque médiévale (1185 à 1868)

Les données sur l'évolution des chiens japonais au Tōhoku pendant l'époque Sengoku (戦国 - 1467 – 1573) sont aussi peu nombreuses que pour l'époque Azuchi Momoyama. À cette époque, le Tōhoku était secoué par d'innombrables combats entre les seigneurs féodaux, mais aussi entre les différentes classes sociales. Une grande majorité de révoltes éclatèrent au sein des classes inférieures et furent appelées, Gekokujō (下克上 - litt. les plus faibles gouvernent les plus forts). Le berceau de l'Akita, Ōdate, n'y fit pas exception et avant l'arrivée du clan Satake (佐竹氏) en 1603, huit seigneurs occupaient le château d'Ōdate depuis 40 ans. Le clan Satake gouverna Ōdate jusqu'en 1867. Sous l'administration de Toyotomi, Ōdate fut rattachée au domaine d'Akita ( (ou Akita-han 秋田藩, le han étant un territoire géré par un daimyo qui jurait fidélité au shogun) et Kazuno au domaine de Nambu. La frontière entre les deux domaines n'étaient cependant pas totalement limpide, ce qui déclencha une dispute sur la propriété des mines de Numayama qui venaient d'être ouvertes sur le domaine de Nambu. Cette dispute fut amplifiée d'autant plus que cette zone regorgeait de ressources importantes, telles que les mines d'or de Shirane et d'Osarizawa sur le domaine de Nambu, les mines d'or d'Akasawa et d'Ōkuzo sur le domaine d'Akita, ainsi que les ressources en bois le long de la rivière Nagaki. Les hostilités entre les habitants de chaque domaine se renforçaient à mesure que chacun pensait que ces ressources lui étaient dues. Ce n'est que 60 ans plus tard, en 1677, qu'un accord fut conclu sous l'arbitrage du shogunat.


La légende du sanctuaire du vieux chien (Rōken-jinja - 老犬神社) de la communauté du Kuzuhara se transmet de génération en génération dans cette région. C'est l'histoire d'un chien loyal et qui a aussi pour fond les tensions qui existaient entre les deux domaines. Voici l'histoire :

"Le Matagi Sataroku, habitant de Kusaki du domaine de Nambu, était un chasseur sous la bénédiction de Daizendayuu Nobunao, seigneur de Nambu. Tandis qu'il traquait sa proie et passa d'un domaine à l'autre, Sataroku réalisa qu'il avait oublié son permis de chasse. Il fut capturé et jeté en prison. Shiro, son compagnon de chasse canin, ne comprenait pas ce qui arrivait. Il resta non loin de son maître, gémissant à ses côtés dès que les gardes s'absentaient. Après de longs échanges entre eux deux, Shiro comprit finalement que son maître avait de gros ennuis. Malgré un estomac vide et une faim tiraillante, Shiro traversa la montagne et les champs pour rentrer chez lui.

Réalisant que son mari avait oublié son permis de chasse, l'épouse de Sataroku le remit à Shiro après l'avoir nourri. Hélas, le temps que Shiro fasse le chemin en sens inverse, il arriva au crépuscule mais c'était déjà trop tard. Sataroku venait d'être exécuté. Il existe de nombreuses versions à cette histoire, selon qui la raconte et son origine. Ces versions furent d'ailleurs grandement influencées par la rancune qui pouvait exister entre Akita et Nambu. Voici ce qu'un habitant d'Akita pourrait vous raconter :

"Sataroku fut capturé sur au sommet du Mt. Raiman à Nambu, et il fut exécuté au château de Sannohe. Sa femme et son fidèle chien "Shiro" furent expulsés de chez eux (tokoro barai : relocalisation punitive courante pendant l'ère Edo) et déplacés à Kuzuhara à Akita. Ayant eu connaissance de cette histoire, les villageois louèrent la loyauté de Shiro et érigèrent le Rōken-jinja sur sa tombe." Et voici ce qu'un habitant du Nambu vous relaterait :

"Sataroku fut capturé et assassiné à proximité de la communauté du Kuzuhara. Conscient de la mort de son maître, Shiro escalada la colline qui surplombe le village et il hurla dans une complainte qui dura une journée et une nuit. À partir de ce jour, Kuzuhara fut frappée d'une série d'épidémies et de maladies. Terrorisés d'être victimes d'autres catastrophes, les villageois accueillèrent chez eux la femme de Sataroku et Shiro. Le Rōken-jinja, dédié à l'esprit de Shiro, fut construit après sa mort.

Au cours de cette période, l'ouverture des mines attira de nombreuses personnes en quête de profit, non seulement des ouvriers, mais aussi des marchands, des moines et des prostituées. Inutile de dire que ceci fit croître rapidement la population autour d'Akita. Comme il était facile de trouver du travail à la mine, de nombreux prisonniers et vagabonds, mais aussi des catholiques persécutés rejoignèrent la communauté minière. Certains furent même capturés et exécutés.

C'est aussi à cette époque, et plus précisément aux alentours de 1630, qu'un certain chien de taille moyenne utilisé pour la chasse, un Akita Matagi ou plus souvent appelé Matagi Inu, se fit connaître dans tout le Tōhoku. On pense que l'Akita Matagi est à l'origine des Akita Inu d'aujourd'hui. Ces chiens étaient la propriété exclusive des Shogun, des généraux impériaux, et étaient utilisés pour traquer le gros gibier et le maintenir encerclé jusqu'à l'arrivée des chasseurs. Le type de gibier traqué comprenait l'élan, l'antilope, le sanglier et l'ours Yezo de 350 kg qui alimentera la légende de ces chiens au caractère tenace.

Pendant la période Tokugawa (徳川時代 aussi appelée époque Edo - 江戸時代), plus de 70 révoltes éclatèrent dans le domaine d'Akita, la majorité selon deux pics bien distincts.

 

Le premier eut lieu entre les périodes Keichō et Genna (1596 - 1623) et eut pour point de départ une opposition contre l'administration Satake et le kenchi, une enquête sur la délimitation des terres, les fermes et leurs productions, dans le but d'indexer les taxes.

 

Le deuxième pic fut déclenché par les famines successives survenues au cours de l'ère Tenmei (Grande famine de Tenmei - 天明の大飢饉 -1782 à 1788) et Tempō (~1830). La famine qui planait déjà depuis plusieurs années sur les populations fut amplifiée par une série de catastrophes comme l'éruption du mont Asama qui rendit quasi-impossible toute culture sur les terres avoisinantes. La grande famine de l'année du lapin (1783) coûta la vie à plus de 7 000 âmes rien que pour le domaine d'Akita.  

 

Des révoltes finirent par éclater, à cause des conditions sociales instables et de l'anxiété grandissantes parmi les habitants de la région.

Ce sentiment de peur les força à trouver un moyen de se défendre et la première étape était l'acquisition d'un chien de garde. C'est alors que le Matagi Inu fut utilisé dans un autre but que la chasse. 
La qualité première d'un bon chien de chasse est sa capacité à pister le gibier et à obéir aux tâches requises pour la chasse. Pour un bon chien de garde, toutefois, un physique impressionnant est primordial. C'est pour ces raisons que la préférence fut donnée aux chiens de plus grande taille et de carrure plus large, influençant les choix de reproduction et augmentant la taille des chiens petit à petit.

Voilà comment est née une race japonaise plus imposante, l'Akita. C'est depuis cette époque que les gens de cette région ont pris l'habitude de posséder des chiens. Les Matagi gardaient des chiens de chasse alors que les riches fermiers et les familles influentes possédaient des chiens de garde. Dans les environs d'Ōdate, certaines familles commencèrent à utiliser leurs chiens pour le combat. La date exacte reste toutefois inconnue. D'après les traditions orales, la plupart des familles possédaient un ou deux chiens féroces. Les plus vieilles familles en particulier élevaient des chiens de la même couleur depuis plusieurs générations comme si elle était leurs propres armoiries. Ces chiens étaient réputés pour leur couleur que l'on associait au nom de leur propriétaire, comme le "Blanc d'Adachi" , le "Bringé de Benzōsama' ou le 'Noir d'Izumi'.

On raconte que : "l'un des seigneurs du château Ōdate, un membre du clan Satake, aimait les combats de chiens par-dessus tout et qu'il organisait fréquemment des combats dans un coin du château, près de la porte du Tigre, dans le but de stimuler le moral de ses hommes." Cette histoire manque hélas de détails et ne se transmet que dans la tradition oral puisqu'aucune trace écrite n'a pu être retrouvée.

En plus de tout ce qui vient d'être expliqué ici, il existe évidemment de nombreuses autres références aux chiens dans des régions différentes d'Akita ou d'Ōdate. Parmi elles, le conte d'Ieyasu Tokugawa qui parle de chasses aux cerfs avec plus d'une soixantaine de Kara Inu (des chiens venus de l'Occident et offerts aux Shoguns) ou les écrits de Motochika Chosokabe détaillant la construction d'une arène de combat à Tosa. Cependant, très peu, voire aucune, de ces références n'est réellement utile à l'étude de l'histoire de l'Akita.

Tsunayoshi Tokugawa, le cinquième Shogun, est la personnalité cynophile la plus célèbre pendant la période Tokugawa. Il est né l'année du chien, ce qui le prédestinait à une affection toute particulière pour cet animal. Cette affection était si extrême, qu'il promulgua la "Loi de Compassion envers les créatures vivantes" afin de les protéger. La moindre infraction, aussi mineure fut-elle, pouvait conduire à l'emprisonnement.

À cause de cette loi, la population canine explosa à Edo (aujourd'hui Tōkyō), ce qui nécessita la construction de nombreux chenils. L'un d'eux fut construit à Okubo (en mai 1695) et l'autre à Nakano (en novembre 1695) sur des terrains dont la superficie totalité 52,8 hectares. On raconte que le nombre de chiens atteignit les 100 000 !

Cette loi absurde causa bien du tracas aux officiels du gouvernement et à la population, ce qui valu à Tsunayoshi Tokugawa, le surnom moqueur, encore connu aujourd'hui, de "Shogun-Chien".

 

On ignore malheureusement ce que sont devenus tous ces chiens à Edo.

Un article dans "Chien, Étude, Chien Japonais" explique : "À l'époque, de la guerre sino-japonaise (1894), un grand nombre de chiens féroces avaient élu domicile dans les douves du château d'Edo, qui étaient devenues un environnement favorable pour eux grâce aux nombreux pins et interdites d'accès au public.

À proximité d'Ochanomizu notamment, la zone est totalement inaccessible à cause de ses divers ravins. Ces chiens avaient donc trouvé refuge dans ces endroits le jour et sortaient la nuit pour chercher de la nourriture en ville. Entre Surugadai et Yotsumitsuke, buissons et bambous étaient devenus si épais les chiens se montraient même de jour. Les habitants de cette zone les appelais "Dote Inu" (chiens de talus).

 

Certaines de ces meutes étaient composées de 20 à 30 individus de races japonaises pures. La plupart étaient noirs, blancs ou pinto. Leur queue pendait naturellement, mais à la nuit tombée lors de combats entre meutes, celle-ci s'enroulait sur leur dos. Tous les Dote Inu étaient des chiens substantiels et imposants, qui pesaient en moyenne entre 30 et 33,75 kg. Certains d'entre eux étaient même plus grands et lourds que les Ōdate Inu, comme celui repéré non loin de Suidobashi qui faisait entre 45 et 48,75 kg."

 

Bien qu'il n'y ait aucune preuve formelle que ces Dote Inu soient des descendants directs des chiens élevés par Tsunayoshi, le "Shogun-Chien", leur présence au cœur d'Edo pendant près de deux siècles (du moins jusqu'en 1894) renforce cette idée. Leur survie n'était certainement dû qu'à la reproduction et la sélection naturelles, et c'est ainsi que les individus devinrent de plus en plus grands et forts.

Pendant la période Tokugawa, le Sankin tōkai, un système qui obligeait les seigneurs féodaux à alterner leur résidence entre leurs terres et Edo, permit des échanges répétés et soutenus entre le centre culturel et les régions excentrées. Il est donc fort probable que des croisements eurent lieu entre les Dote Inu et des chiens régionaux qui accompagnaient leurs maîtres à Edo.

Pour en revenir à l'Akita, le mélange de sangs avec des lignées venues du Nord n'est pas à exclure.

Cependant, il n'existe quasiment aucune trace écrite sur les chiens vivant à Hokkaidō, cette région étant culturellement reculée à l'époque. On sait toutefois qu'un certain nombre de chiens furent apportés d'Hokkaidō. Certains racontent qu'ils s'agissaient d'Ainu Inu (plus tard appelés Hokkaidō). D'autres, dont un ancien d'Ōdate, explique qu'il s'agissait de descendants d'Ōdate Inu apportés par des habitants d'Ōdate ayant émigrés à Hokkaidō à une époque où le peuple du Yamato commencèrent à coloniser la région.

Dans tous les cas, il est évident que le changement d'utilisation de l'Akita (Ōdate Inu), devenu chien de chasse puis chien de garde à cause des conditions sociales et environnementales, a conduit à la sélection de chiens de plus en plus grands.

 

 

Histoire de l'Akita Inu - Partie 3 - Époque moderne (1868 à 1945)

Comme nous l'expliquions, les chiens japonais autour d'Ōdate furent utilisés pour la chasse, la garde et le combat, ce qui modela leur physique petit à petit. Quoiqu'il en soit, ils furent élevés en fonction des conditions sociales et environnementales de l'Homme depuis des temps immémoriaux jusqu'au milieu de l'ère Meiji (1890).

 

Au début de 1890, les croisements devinrent de plus en plus populaires à cause principalement des combats de chiens qui étaient devenus des évènements publiques organisés par quelques passionnés.

 

Cherchant des chiens de plus en plus imposants et de plus en plus féroces, cela conduisit à la création d'un nouveau type de chiens qui perdaient peu à peu les caractéristiques des races japonaises, comme leur queue dressée et/ou enroulée sur le dos.

De nombreux incendies ravagèrent la ville d'Ōdate après la Restauration de Meiji (1868) et aucune trace écrite n'aurait survécu. Le seul document faisant mention des Ōdate Inu date de 1870 environ et il s'agit d'un livre écrit par M. Susumu Ono, un professeur au lycée d'Ōdate. Le livre intitulé 'Discussion sur le monde du chien dans la ville d'Ōdate" reprend les discussions entre les anciens autour d'une table.

Le souvenir qui avait le plus marqué les anciens, dont la plupart étaient nés durant les ères Ansei (安政) et Bunkyū (文久) (1854-1863), était celui d'un chien appelé "Naka no Tera no Moku" et qui aurait été élevé au Temple Jō-ōji (浄応寺). L'histoire a certainement été encensée mais, d'après eux, Moku Go ne mesurait pas moins de 85 cm au garot.Il était de couleur pinto et sa fourrure était relativement longue et épaisse. Il était si puissant que deux enfants et un adulte pouvaient monter sur son dos et que deux ou trois chiens n'auraient pas pu le vaincre. Il serait né au village d'Hayaguchi au nord de la préfecture d'Akita. Il était le seul chiot d'une portée née à la fin de l'ère Ansei (fin 1850) et aurait vécu durant les ères Man'en, Bunkyū, Genji et Keiō (~1860). Il fut tué en 1871 par la lance d'un Samurai inconnu. Plusieurs descendants connus de 'Moku Go' étaient tous des chiens très féroces. Parmi eux, on retiendra "Saku" du village Niisaawa, "Jiku" du village Matō, "Aka" du village Misonai et "Goma" de Benzōsama. Leurs caractéristiques et leurs spécificités demeurent malheureusement inconnues.

Aux alentours de 1897, les combats de Tosa Inu (土佐犬) ont été introduits dans la préfecture d'Akita. À cette époque, la province deTosa, aujourd'hui devenue la préfecture de Kōchi au sud de l'île de Shikoku, était l'une des deux régions les plus populaires en matière de combat de chiens. À l'origine, la race d'Ōdate était plus puissante que celle de Tosa. Cependant, la tendance s'est inversée progressivement, à cause de croisements entre le Tosa Inu et de races venues d'Europe.

 

Par esprit de compétition, il semblerait que la race d'Ōdate fut également croisée avec un très grand chien aux oreilles pendantes, certainement un Mastiff, possédé par un ingénieur des mines allemand en visite à la mine de cuivre d'Ani à Kosaka, dans la préfecture d'Akita.

 

Un croisement parallèle fut effectué avec un autre très grand chien, probablement un croisé St. Bernard, qui fut acheté à l'étranger autour de 1904 par M. Kenkichi Mogami de la ville de Kakumagawa au sud d'Akita, probablement en réponse à la venue de la société canine de combat de Tosa en visite à Ōdate. C'est ainsi que les caractéristiques originelles de l'Ōdate Inu, oreilles dressées et queues enroulées, furent perdues. Ce croisement fut le premier de deux reculs majeurs pour la race Akita à la fin du XIXe siècle.

 

Comme expliqué précédemment, les combats de chien de l'époque étaient extrêmement populaires au point d'être devenus une véritable institution où des évènements publiques étaient organisés.

En 1899, une organisation pour les combats de chiens fut créée à Ōdate. Son nom était "En yūkai" (園遊会) qui pourrait se traduire par 'Garden Party'.

 

Une arène fut même construite au bourg de Shintomi et des frais d'entrée de 5 sens pour les adultes et de 3 sens pour les enfants. À l'apogée de sa popularité, plus de 100 chiens participaient à chaque évènement et des programmes de matchs étaient même distribués.

 

C'est cet esprit de compétition entre Ōdate et la société canine de combat de Tosa qui intensifia l'engouement et la virulence des combats de chiens... mais aussi le caractère dominant des chiens.

En 1901, un groupe de la société canine de combat de Tosa voyageait à travers les régions ouest du Kansai et du Kantô.

 

Vers la fin de l'année, il se rendit à Ōdate et mit en place des matchs contre des Ōdate Inu qui avaient la réputation d'être plus gros, plus lourds et supérieurs aux Tosa.

 

Étant donné leur connexion avec l'Akita, faisons une parenthèse sur les origines du Tosa de combat.

 

Les différentes archives indiquent qu'il s'agirait d'une race non originaire du Japon, mais qui serait plutôt le fruit de croisements entre les chiens de Tosa (qui se rapprocheraient aujourd'hui plus des Shikoku) et des races étrangères.

Tout cela serait survenu après le début de l'ère Meiji. On raconte que les chiens suivants ont servi à créer le Tosa de combat :

 

Le premier serait un chien féroce ramené de Nagasaki entre 1848 et 1853 (ère Kaei).
Puis autour de 1870, un Bulldog possédé par un professeur d'Anglais à Kochi et un Mastiff appartenant à un docteur allemand furent utilisés. Parmi les autres, on compte un Boston Bull, un Bull Terrier et de nombreux Saint-Bernard.

Au cours de l'ère Taisho (1912-1925), un Dogue allemand importé d'Allemagne par M. Kyononvivant au sud d'Akita et des Mastiffs appartenant à M. Matsunaga de Tokyo et M. Oohara d'Okayama furent croisés avec des Tosa pour produire d'excellents Tosa de combat.

Des photographies de Tosa de combat prises durant l'ère Taisho, et propriétés d'un cynophile d'Akita, montrent des chiens bien différents d'aujourd'hui sur le plan physique. Peu affichent les caractéristiques du Mastiff contrairement à ce qu'on peut voir de nos jours, et certains reflétaient l'influence de races étrangères telles que le chien d'arrêt. On note également que leur taille n'est pas aussi imposante que nos chiens d'aujourd'hui. Enfin, il y avait également certains individus qui comportaient toutes les caractéristiques des races japonaises, c'est pourquoi on leur donna l'appellation de "chiens japonais pure race". Ce besoin de dénommer des chiens "purs" était le résultat de la population grandissante de chiens croisés.

 

 

 

Confiants de leur succès contre les Tosa de combat, les organisateurs et amateurs de combats de chiens d'Ōdate subirent toutefois un terrible revers.

Les combats de chiens, de taureaux et de coqs étaient devenus très populaires dans diverses régions du Japon. Les paris étaient parfois si colossaux que les pouvoirs en place décidèrent de s'interposer. En 1909, Masataka Mori, alors gouverneur de la préfecture d'Akita, instaura un décret interdisant les combats de chiens.

Les inconditionnels de combats de chiens d'Ōdate perdirent peu à peu l'envie de garder leurs chiens. Pour empirer les choses, une taxe sur les propriétaires de chiens fut instaurée l'année d'après. Si on ajoute à cela, l'extermination massive de chiens errants à cause d'une épidémie de rage, l'Ōdate Inu était à deux doigts de disparaître. On raconte même que tous les chiens avaient disparu des rues d'Ōdate.

Même après le début de l'ère Taisho (1912), rien n'avait changé à Ōdate. À Tōkyō, par contre, plusieurs articles cynophiles fleurissaient ici et là dans la presse amateure et professionnelle. Le magazine "Inu" (Chien) contenait un article rédigé par Motoharu Hayashi, un habitant d'Ōdate, intitulé "Protéger les chiens japonais" et dans lequel il écrit que les combats de chiens devraient être encouragés comme moyen de préservation des races japonaises.

C'est à cette époque que le Dr. Shozaburo Watase, un honorable professeur de science à l'Université de Tōkyō rédigea la future législation sur la préservation des monuments naturels. Il enquêta sur les chiens japonais restants dans les différentes régions du Japon afin de comprendre les origines des races japonaises.

Il écrit alors un article, intitulé "Les races de chiens du Japon" dans le volume 6 du magazine "Inu", suivi de plusieurs autres tels que "Sur les traces des chiens japonais" et "Les chiens dans la culture japonaise". En 1922, il donna une conférence sur les origines des races japonaises au meeting annuel de la Société Zoologique de Tōkyō. Cette conférence fut ensuite publiée dans le volume 22 de la "Société Scientifique" et cet article servit maintes fois de référence, encore aujourd'hui.

D'autres auteurs publièrent des articles sur les chiens japonais, notamment dans le magazine "Chiens et chasse". Ces articles traitaient surtout des combats de chiens entre les Ōdate Inu et les Tosa de combat, mais aussi de la chasse.

En 1914, deux Ōdate Inu furent présentés à l'exposition Taisho à Ueno. Ils remportèrent une médaille de bronze et une médaille d'argent.

Bien que les combats de chiens avaient cessé dans la préfécture d'Akita à cause des arrêtés préfectoraux, ils étaient toujours d'actualité, non loin de là, à Kuroishi dans la préfecture d'Aomori. Rapidement, la situation autour des combats de chiens devint moins stricte et les inconditionnels de cette pratique recommencèrent à organiser des combats de manière illicite, souvent dans des sanctuaires ou dans des terrains vagues, à la nuit tombée. C'est ainsi que les combats de chiens retrouvèrent l'engouement d'antan, et des matchs étaient à nouveau organisés entre les Ōdate Inu et les Tosa de combat en 1915 et 1916.

Cependant, ce nouvel engouement pour les combats entre ces deux races compliqua la situation pour ce qui est de l'Ōdate Inu. Tandis que les propriétaires de Tosa de combat vantaient les mérites de leur race et que les propriétaires d'Ōdate Inu en faisaient de même pour la puissance de la leur, ils étaient tous d'accord pour reconnaître les qualités de chacune des deux races. C'est ainsi que les propriétaires de Tosa de combat décidèrent d'acquérir plusieurs Ōdate Inu... et que les propriétaires d'Ōdate Inu acceptèrent des saillies sur des Tosa de combat.

 

Les croisements s'intensifièrent au point de produire des chiens d'un type totalement différent qui fut appelé "Kairyō Ken" (改良犬 - Chien amélioré) ou "Shin Akita" (新秋田 - Nouvel Akita). La seule véritable différence avec le Tosa de combat était le port de queue. Le Kairyō Ken devait idéalement porter sa queue bien enroulée sur le dos. Ces nouveaux types furent promus et encouragés jusqu'au début de l'ère Shōwa  (昭和 - fin 1920). On peut dire qu'à cette époque, il était devenu impossible de trouver un chien japonais de pure race à Ōdate. Fort heureusement, des chiens régionaux étaient toujours conservés dans les petits villages autour d'Ōdate pour la garde, ou dans les villages de Matagi, dans les montagnes, pour la chasse. On peut donc dire qu'il existait deux types d'Ōdate Inu au début de l'ère Tasiho (1915). L'un d'eux avait les oreilles levées et la queue enroulée sur le dos. L'autre, qui avait été élevé sciemment, avait les oreilles tombantes ou à moitié levées, mais aussi parfois le front plissé.

Pendant ce temps à Tōkyō, des intellectuels et des professeurs soulevaient des questions et donnaient leur opinion sur la préservation des traditions japonaises, des sites historiques, des sites géographiques, de la faune et de la flore, etc. En 1919, une loi désignant tous ces éléments comme Monuments Naturels est promulguée et immédiatement mise en place. L'article 8 de cette loi est dédié tout spécialement à la faune sous l'intiltulé "d'animaux uniques au Japon". Voici en référence, les différents critères pour qu'un animal soit désigné comme Monument Naturel :

1. Un animal bien connu et unique au Japon, ainsi que son habitat.

2. Un animal pouvant être qualifié de japonais, bien que non unique, mais dont l'habitat et lui nécessitent d'être préservé.

3. Un animal unique ou une population d'animaux dans leur environnement naturel.
4. Un animal domestique unique au Japon.

5. Un animal connu, non domestiqué et apporté au Japon, vivant actuellement à l'état sauvage ainsi que son habitat.

6. Une espèce animal de grande valeur.

 

Le Dr. Watase, qui a élaboré la loi, a répertorié les animaux suivants comme candidats au titre de Monument Naturel : Onagadori (une race de coq à longue queue) à Tosa, Uzuraochabo (une autre race de gallinacée), Akita, Tosa, Chin, Ōkiuma (une race de chevaux), Tosakoma (une autre race de chevaux) et les bovins et chevaux de Tanegashima.

 

Le Dr. Watase s'est rendu en personne à Ōdate pour enquêter sur l'Akita. En cette période de déclin pour l'Akita, il ne trouva aucun chien digne d'être choisi comme Monument Naturel.

Pendant les 10 ans qui suivirent sa visite à Ōdate, la nomination de l'Akita en tant que Monument Naturel était encore incertain. Cependant, son enquête permit de réveiller les esprits et fut le premier pas vers la restauration des races japonaises, et de l'Akita tout particulièrement. À cette époque, les cynophiles d'Ōdate n'élevaient des chiens que pour le combat. Aucun d'eux ne s'imaginait qu'une loi nationale serait publiée pour que les Ōdate Inu, des chiens régionaux, deviennent des Monuments Naturels. L'enquête du Dr. Watase pour vérifier l'éligibilité des Ōdate Inu prit tout le monde par surprise, mais tous réalisèrent l'importance de préserver les races japonaises pures. Ce fut la première étape vers la préservation des races japonaises.

Au début de l'ère Shōwa, rien n'avait encore réellement changé comparé aux ères Meiji et Taisho. Les combats de chiens étaient toujours extrêmement populaires et seuls quelques personnes faisaient des efforts pour la préservation des races japonaises pures.

Le maire d'Ōdate, M. Shigeie Izumi, était très inquiet et concerné par les mauvais croisements entre le chien d'Ōdate avec d'autres races. Dans un effort pour protéger la race d'Ōdate, il fonda en 1927 l'Akita Inu Hozonkai (秋田犬保存会 - AKIHO), la société de préservation de l'Akita Inu. Puis, avec l'accord du Dr. Watase, M. Hirokichi Saito, qui œuvrait lui aussi à la préservation des races japonaises depuis le début des années 1920, fonde NIPPO en juin 1928.


Par chance, des journaux comme le "Tokyo Asahi", le "Tokyo Nichinichi" et le "Yomiuri" couvrèrent ces évènements dans leurs gros titres dans tous le Japon offrant une aide presque quotidienne. Dans la réalité, toutefois, les races étrangères avaient toujours autant la cote et étaient croisées avec des chiens régionaux pour améliorer les races locales. Cela va sans dire que c'était à contre courant des efforts réalisés dans la préservation et le développement des races japonaises. La désignation d'une race comme Monument Naturel était donc le meilleur moyen pour décourager les croisements excessifs, en faisant prendre conscience aux cynophiles et au public de l'importance de conserver une race pure. L'Akita devint le premier candidat.

À cette époque, le Dr. Watase était déjà décédé et il n'avait toujours pas eu de successeur. M. Shigeie Izumi, membre du conseil du NIPPO et maire d'Ōdate, prit l'initiative d'envoyer la demande de candidature pour l'Akita. C'est un peu plus tard que le Dr. Tokio Kaburagi fut assigné comme membre de l'Hozon Kyokai et que l'Akita devint, en juillet 1931, Monument Naturel. Cette race devient également officiellement, l'Akita Inu.

 

Tochini Go, le chien dont la candidature avait été envoyée par M. Izumi, était décédé au moment où le Dr. Kaburagi se rendit à Ōdate. C'est pourquoi des descendants de Tochini Go furent désignés à sa place, dont son fils Kin Go et sa fille Matsukaze Go, tous deux propriétés de M. Izumi. Parmi les autres chiens, on peut noter un mâle appartenant à M. Ichinoseki, une femelle de M. Aoyagi, une femelle de M. Takahashi, un mâle de M. Tayama et une femelle de M. Akahira. D'après M. Kaburagi, le chien de M. Ichinoseki et les femelles de M. Aoyagi et Akahira étaient des descendants des Akita de M. Izumi. Ce n'est que plus tard que leurs pédigrées furent confirmés.

Malgré tous les efforts engagés pour restaurer "l'Akita Inu", les combats de chiens étaient toujours une activité populaire à Ōdate ce qui ne facilita pas la tâche. Quelques personnes informées de la situation firent tout de même tout leur possible pour préserver la race. Cela comprenait, bien sûr, M. Shigeie Izumi, mais aussi M. Susumu Ono et M. Yaichiro Tayama, tous trois membres d'Aiken Kyokai à Ōdate. D'autres personnes ont joué également un rôle important, comme M. Kunio Ichinoseki du village de Niida et M. Hyouemon Kyono de Yuzawa, au sud d'Akita. Dans cette optique de restauration de la race, ils dépêchèrent des représentants dans les campagnes et les villages de Matagi pour acquérir des chiens régionaux ayant été épargnés par cette vague de croisements.

Mais c'est un article paru le 4 octobre 1932, dans le quotidien "Asahi Shinbun", et dédié à un certain Hachikō, qui attira le regard d'une nation entière. Cet article avait été intitulé "L'histoire émouvante d'un vieux chien : 7 ans à attendre son maître décédé". Son contenu et la photo pour l'illustrer coïncidaient parfaitement avec l'humeur de l'époque (Incident de Mandchourie en 1931) et touchèrent le cœur, non seulement des cynophiles, mais de la nation japonaise toute entière. Le nom d'Hachikō résonna dans tout le Japon et permit, par la même occasion, de mettre les projecteurs sur l'Akita Inu.

Cependant, aucune amélioration dans la race n'eut lieu à cette époque (à cause de l'Incident de Mandchouri), ni même dans les 15 années qui suivirent à cause de la guerre. C'est aussi pour cette raison que les documents traitant de l'Akita à cette période se limitent à la seule histoire d'Hachikō.

En ce qui concerne les autres races japonaises, le développement du NIPPO permit la mise en place d'expositions entre novembre 1932 et le milieu de la Seconde Guerre Mondiale en 1942. Plusieurs Akita Inu furent exposés dans la catégorie des grandes races, et leurs ancêtres comprenaient des lignées d'Hokkaidō et de Kishu. C'est sur cette indication que d'autres races japonaises, comme le Matagi Inu, furent utilisées pour les croisements.

En novembre 1947 à Ōdate, berveau de l'Akita Inu, AKIHO tint son 11e Hombuten. Malheureusement, il n'existe aucune donnée à ce jour concernant les 10 Hombuten précédents, à l'exception d'une liste de membre datée de 1942 (possédée par M. Sadakichi Tayama, un membre sénior) qui donne simplement une indication sur le nombre de membres de l'époque.

En cette période de guerres, les sociétés canines telles qu'AKIHO ne pouvaient qu'espérer survivre sans même se soucier de leur développement.

Dans la région d'Akita, mais aussi dans le Japon tout entier, les documents sur le sujet se firent de plus en plus rares à mesure que la guerre progressait. Tout était sous contrôle militaire, et le rationnement était en vigueur. L'Akita, étant un chien imposant, vit sa population se réduire de façon drastique étant donné les diffilcultés pour leurs propriétaires à les nourrir.

Rapidement, la guerre s'étendit jusqu'aux régions septentrionales de Chine, forçant l'armée à utiliser chiens et chats comme source de fourrure pour leurs équipements militaires. À cause de leur grande taille, les Akita furent particulièrement prisés et recherchés. Ainsi, la police ordonna la capture de tout chien à l'exception des Bergers Allemands.

 

Dans le but de sauver leurs chiens de la réquisition militaire et empêcher qu'ils ne finissent en vulgaire fourrure, les éleveurs les croisèrent avec des Bergers Allemands. Lors de la seconde guerre mondiale, de nombreux propriétaires et cynophiles firentde même et croisèrent leur Akita avec des Bergers Allemands afin d'échapper à l'effort de guerre. D'autres envoyèrent leurs chiens chez les Matagi et les fermiers dans les montagnes ou dans les pommeraies de la préfecture d'Aomori pour qu'ils servent comme chiens de garde.

Une autre astuce pour échapper aux ramasseurs de chiens était de donner des noms de Bergers Allemands à leurs chiens.


On sait qu'il y eut aussi plusieurs croisements à droite à gauche. Cela expliquerait pourquoi de nombreux étalons et lices Akita d'après-guerre avaient des noms comme "Peace", "Long", "Carl" ou "Mary". Quoi qu'il en soit, ce fut une période sombre pour les chiens et les amoureux de la race.

 

 

 

Histoire de l'Akita Inu - Partie 4 - Helen KELLER

La célèbre écrivain, conférencière et humaniste, Helen Keller est reconnue par beaucoup comme étant celle qui aurait importé les premiers Akita en Amérique. Miss Keller, qui était sourde et muette, effectuait un voyage au Japon en 1937 pour enseigner aux personnes physiquement handicapées.

Après avoir entendu l'histoire d'Hachikō, elle demande à ce qu'on lui présente la race. On lui montra un chiot de deux mois appartenant à M. Ogasawara, un membre du département de police d'Akita, et ce fut le coup de foudre. Son nom était Kamikaze Go. 
M. Ogasawara accepta de l'offrir à Miss Keller comme présent.   

Lorsque Miss Keller retourna aux USA deux mois plus tard, elle emmena le petit Kamikaze Go avec elle. Malheureusement, dans le mois qui suivit, il mourut de la maladie de Carré. Il fut ensuite convenu qu'un frère de portée de Kamikaze, Kenzan Go, soit envoyé aux USA où il devint rapidement un ami et le protecteur de Miss Keller. Elle le décrivait d'ailleurs comme son "Ange en fourrure" et il resta à ses côtés jusqu'à sa mort dans les années 40.